Directrice adjointe de 4 établissements du Territoire Grand-Sud-Ouest, Isabelle Gely est venue prêter main forte à la Maison d’accueil spécialisée de Château-Thierry, dans l’Aisne. A plus de 800 km de son domicile, elle a, pendant trois semaines, apporté un appui à la direction de la MAS dans un contexte de crise sanitaire.

Photo d'Isabelle Gely

Lundi 6 avril, vous recevez un appel de Jean-Christophe Janny, directeur général adjoint à la Fédération. Il vous parle des difficultés rencontrées à la Maison d’accueil spécialisée (MAS) de Château-Thierry, dans l’Aisne, un département particulièrement touché par le Covid-19…

Monsieur Janny m’a expliqué que le directeur de transition alors en place à la MAS était potentiellement positif au Covid-19. La situation était donc urgente car l’établissement risquait de se trouver sans Direction dans les deux jours à venir. J’ai dit “oui” tout de suite ! Monsieur Janny a même été surpris que je ne prenne pas le temps de réfléchir ! Je suis partie dès le lendemain pour être opérationnelle le mercredi. Mon premier métier est Infirmière. Les valeurs d’infirmière ont toujours été mon fil conducteur, c’était donc impossible pour moi de refuser. J’avais en plus une expérience de gestion de crise sanitaire puisque j’avais travaillé à La Réunion pendant la crise du chikungunya.

Comment s’est passée votre arrivée à la MAS ?

Je suis arrivée le mardi 7, dans la soirée. J’ai été très bien reçue que ce soit par la Directrice territoriale, le Directeur de transition mais aussi les Ressources humaines et les équipes de la MAS.

Je crois que je suis arrivée au bon moment car il y a eu un premier cas de Covid-19 à gérer le premier jour. Puis, 3 jours après, 5 résidents étaient contaminés. C’était très intense car nous avons dû décliner les mesures de protection sur 11 résidents. Nous avons fait une unité de vie “Covid-19” avec les mesures barrières et de protection maximales (port de gants, masques FFP2,surblouses, lunettes, etc.).

La MAS était-elle suffisamment équipée en masques, gants, etc. ?

L’équipement individuel doit être changé très régulièrement donc nous avions un risque de tomber rapidement en rupture de stocks. Nous avons bénéficié d’une solidarité formidable de la part du Territoire Grand-Nord mais aussi du Territoire Grand Sud-Ouest qui a fourni des surblouses. Des prestataires ainsi que l’ARS ont également donné du matériel. Toutes ces aides nous ont permis de ne jamais être en rupture de stocks et de pouvoir protéger les salariés et les résidents.

Avez-vous rencontré des problématiques spécifiques liées au type de la structure (MAS) ?

Curieusement, je m’attendais à rencontrer des difficultés classiques comme l’exacerbation des comportements problèmes comme de l’hétéro ou auto agressivité. Finalement, c’était une idée reçue : les résidents vivent bien l’isolement. Cela est surtout dû au travail des équipes. Du personnel supplémentaire, de l’IME La Maison d’Héloïse, est venu en renfort. Puis avec le confinement, les sorties et les réunions sont annulées. Les professionnels ont donc davantage de temps pour être présents avec les résidents et organiser des activités, au-delà des actes de la vie quotidienne.

Nous avons aussi utilisé Skype et WhatsApp pour permettre aux résidents de garder le lien avec leur famille. Ca a été un énorme “plus” pour eux de ne pas être coupés de leurs proches.

Comment rassurer les professionnels, en première ligne, pendant cette crise ?

Les professionnels venaient travailler avec la boule au ventre. Il y avait une peur réelle de tomber malade et ensuite de contaminer ses proches. Il a fallu soutenir moralement et individuellement les salariés, en les écoutant et en leur faisant exprimer leurs inquiétudes. Avec le directeur de transition, nous avons également présenté les mesures de protection mises en place et nous avons formé chaque professionnel aux mesures de protection maximale. Si demain, tout le monde est contaminé, les professionnels seront opérationnels pour gérer la crise !

Professionnellement, que vous a apporté cette expérience ?

J’ai trouvé la mission passionnante, très riche humainement et au niveau organisationnel. Humainement, j’ai découvert une nouvelle structure, une nouvelle équipe bienveillante et investie. Au niveau organisationnel, cela m’a également appris à m’adapter sans cesse : peu importe ce que l’on met en place en terme de prévention, il ne faut pas perdre de vue que tout peut basculer d’une heure sur l’autre. On connait tous la mouvance du médico-social qui est démultipliée dans le cadre de cette cadre sanitaire .Un petit regret toutefois : ne pas avoir eu le temps de visiter la région et de goûter son champagne !